C'est quoi un couple en 2020?
- Kaia Te
- 20 mars 2020
- 10 min de lecture
Dernière mise à jour : 31 mars 2020
Quand j’ai lancé le sujet sur ma publication Facebook avec le lien du questionnaire « Couple années 80 VS couple année 2020 », je ne pensais pas obtenir autant de réponses (je tiens donc à vous remercier d’avoir joué le jeu). Je m’attendais encore moins à lire autant de jolies choses sur votre conception des relations. En effet, je m’étais dit à l’avance : ils vont me pondre des commentaires hyper négatifs et on va avoir des réactions à la con ! J’imaginais, compte tenu de tout ce qu’on peut lire aujourd’hui sur les relations amoureuses, que vous alliez me sortir des trucs qui ressemblent à : « Le couple maintenant, ça ne veut plus rien dire ! » « On veut que du cul ! » Bref, des discours stéréotypés d’une génération flinguée par les réseaux sociaux et la conso à outrance, qui ne croit plus en l’amour et qui n’a plus confiance en l’autre ou, plutôt, qui n’a plus vraiment confiance en elle.
A m’en méprendre donc.
Si on décide tous les deux de lancer ce sujet en premier dans notre rubrique "Sex’affect" c’est dans le but d’introduire les sujets qui vont suivrent, qui seront eux, plus légers, sur des thématiques plus piquantes et je l’espère plus funky ! Ceux qui s'attendaient à un premier article "trash" vont peut-être être déçus. Après tout, faire attendre peut-être positif... (Tiens on en fera peut être un sujet...)
C’est vrai, on ne peut pas commencer à parler, sensualité, sexualité, rapports amoureux sans brosser un tableau plus généraliste de ce qu’on vit tous aujourd’hui, de la manière dont : chacun perçoit le couple, perçoit l’amour, perçoit sa vie sexuelle
à l’ère de l’hyper-connectivité et, paradoxalement, à l’ère du repli sur soi.
Mon gôut pour la joute verbale et le fight avec certains de mes proches sur des sujets que je sens sensibles m’a permis de me questionner à plusieurs reprises sur la définition du couple et des différences qui peuvent exister entre notre génération et celle de nos parents. J'ai donc posé d' innombrables questions à des membres de ma famille et à certains de mes amis, parfois ensemble depuis plus de 30 ans et qui semblent être toujours heureux. Même si la question du bonheur est encore un autre merdier complexe. C'est vrai qu'on peut se demander si se farcir la même personne pendant toutes ces années, c'est pas se planter une épine dans le pied qu'on arrivera jamais à enlever.
"Tu nous fais un peu chier avec toutes tes questions mais au final c’est sympa de pouvoir parler de ça » Je tairais le nom de cet enfoiré que j’aime particulièrement et qui m’a
balancé ça un vendredi soir entre un verre de vin et un plateau de charcut’.
Être un couple aujourd’hui, ça signifie quoi pour vous » ?
Quand je bossais à Paris, je me souviens sortir de chez moi, prendre le métro par un temps bien pluvieux, comme souvent, et me poster dans la station Pyrénées sur le banc , les yeux hagards, direction Châtelet les Halles, ligne 11. Devant moi, une énorme affiche colorée:

Mes études de communication aidant, j'ai trouvé cette affiche assez bien faite: le slogan bien travaillé, l'image de la pomme croquée bien trouvée et en dessous l'indication: "1er site de rencontres extra-conjugales" Ben merde alors, ils ont réussi à faire de la publicité sur un programme d'infidélité et , surtout, réussi à avoir un public averti pour cette appli'. Ils tentent d'attirer finement et sans aucun scrupule les gens en mal d'amour, en galère dans leurs vies de couple. Le but étant de les faire succomber au plaisir de la chair et de la nouveauté. Je me suis demandée combien de personnes ont osé télécharger l'appli dans le métro: " juste pour voir". "Mais où va le monde!": J'entends déjà la p'tite mamie, que l'on voyait régulièrement aller chercher son pain près du métro, être interloquée par tout ce qui se fait maintenant "Dans notre temps c'était pas ça! Plus rien de constructif chez vous les jeunes!" Et pourtant, pas certaine que ça cible uniquement la jeune population.
Aujourd'hui, si t'es casé voire marié, si ton mec ou ta nana prend le métro, et qu'il tombe aussi sur ce genre de pub, bien que t'aies la confiance la plus aveugle et totale en la personne qui partage ton lit et tes corn flakes le matin, tu peux avoir le droit de flipper.
Pendant les repas conviviaux qu'on organisait parfois, j'observais mes proches qui commençaient à se chauffer autour du rosbeef, avec des p'tits pics sympatoches : " vous êtes vraiment une génération à la con!" ou encore " vous changez de mecs comme de chaussettes " ou encore ma mère qui s'énervait sur mon meilleur ami " pfff... je ne sais plus quoi te dire, à peine tu commences une histoire que tu la termines pour en recommencer une autre! Vous ne réussirez jamais à garder quelqu'un!" ou le terrible "Moi à ton âge j'avais deux enfants, un mari!" Et bim, prends ça dans les dents. Je remarque donc, à ce moment même, que le sujet est sacrément épicé.
Je décide d'attendre deux jours avant de regarder vos réponses, car je connais trop bien certains d'entre vous et je ne voulais pas spoiler l'anonymat des résultats .
Vous êtes tous des loveurs!
Non non, c'est pas une blague.

Pour un premier questionnaire, on est plutôt contents de votre participation. En même temps, vu qu'on est tous en quarantaine, j'aurais pensé que vous auriez été plus nombreux. C'est vrai, vous n'avez aucune excuse " j'ai plein de trucs à faire Kaïa, je le remplis dès que j'ai du temps" Gros mytho. On verra quand j'en ferai un autre davantage tourné sur le sexe, il y aura p'tet plus de monde au rdv. ;) Encore merci les gars : 7 ont répondu contre 6 nanas!

Une majorité de trentenaires a participé mais chaque catégorie a été représentée, sauf les plus vieux! Si j'avais plus de temps, beaucoup d'espoir et de patience, j'enverrais peut être par la poste un questionnaire papier mais le temps que je les reçoive tous, avec vos conneries, les articles de ma rubrique paraîtront toutes les 3 semaines.
Etre en couple, pour vous, ça veut dire quoi?
-"C’est être heureux et épanouie avec une personne qui nous tire vers le haut"
- "De la complicité, de la confiance, du partage, du soutien, et surtout du respect"
- "Partagez ensemble de beaux moments, des soirées Netflix, manger du chocolat 🍫"
- "Etre en couple c'est aimer l'autre amoureusement. Chaque couple construit sa propre histoire commune avec des valeurs communes, un respect mutuel, et se rassemble avec des objectifs communs. La relation amoureuse lie le couple."
- "Des gens qui s'aiment et partagent certains intérêts"
- "Vivre ensemble dans le respect de l'autre et construire des projet à deux"
- "2 personnes qui s'aiment et qui restent unis malgré les épreuves de la vie"
Kendrick lamar, artiste américain hip hop, traduction: "(...) Quand est-ce que nous comprendrons que nous sommes sur terre pour s'aimer? C'est tout. Tout le monde veut comprendre à quel point la vie est compliquée et tout renverser. C'est vraiment tout ce que je pense. Je pense vraiment que tout va continuer, le monde continuera à tourner, la frustration à grandir, la colère continuera à grandir, jusqu'à ce que nous revenions au mot le plus simple: l'amour."
Pourquoi alors sommes-nous devenus si compliqués? Génération d'éternels insatisfaits?
Le couple= commune institution qui suit ses règles et lois depuis plusieurs générations dans nos sociétés occidentales ? Vous savez : Le chien, puis le crédit, le monospace (ou le break), les enfants et puis nouveauté : 50% de chances (risques) de divorcer ?
Ce schéma pré-établi justifierait-t-il tous les divorces ?
Il faut prendre deux éléments en compte:
Le premier est d’ordre législatif et social : l’émancipation de la femme et la procédure « simplifiée » de divorce.
"Aujourd'hui, ce qui a changé c'est l' indépendance financière de la femme/ l'égalité homme/femme. L'homme peut faire le ménage et la femme travaille. La femme sort autant que l'homme. Entre copines , on boit et fume autant. Elle a beaucoup plus d'expériences et on se sent libre. Dans le couple d'hier: le mariage était très important et le couple se mariait très jeune , avec maison et enfants. La femme gardait la maison et les enfants. Elle était dépendante de son mari. Le divorce était mal vu, surtout pour une femme."
Sur ce point ( l'émancipation de la femme), pas non plus besoin de déblatérer. On en parlera plus tard. Néanmoins, le second critère invite plus à la curiosité et aux questions que chacun devrait se poser sur le couple. C’est celui de la société de consommation (doux euphémisme pour ne pas dire ultra consommation). Alors oui, on achète, jette, on ne prend plus la peine de réparer, on commande (en express pour les impatients), on en veut plus, toujours plus, le dernier cri, une plus grosse voiture que son voisin (attention : belle bagnole : petit popol).
Alors, les sentiments et le couple peuvent-ils échapper à ça ? Ou, désormais, font-ils partie, au même titre que tout ce qui nous entoure, des choses à jeter (et non à réparer) ?
"Aujourd'hui nous ne faisons pas assez d'efforts pour garder quelqu'un près de nous. Avant, quand quelque chose se brisait, on cherchait le moyen de tout rafistoler. Aujourd'hui.. quand c'est cassé, on jette.."
"Quand la relation ne fonctionne plus, les couples se séparent, avant souvent ils restaient ensemble"
Aujourd'hui la consommation prime. On s'attache et on se jette très facilement. Autrefois on prenait le temps de comprendre l'autre et d'affronter les soucis à deux."
"Aujourd'hui la notion de couple a perdu son sens malheureusement. Pour un rien on se sépare alors que si nous faisions comme nos aînés à réparer les choses, il y aura des fondations solides"

L'herbe est-elle plus verte ailleurs?
Il est nécessaire de replacer toutes ces questions dans le contexte du monde qui nous entoure, plus précisément du mode de consommation qui nous entoure. Tout cela ne représente pas une excuse derrière laquelle se cacher, bien entendu, il faut accepter que parfois ça n’aille plus dans un couple, ce sont les aléas de la vie. Toutefois, il faut s’interroger sur notre capacité à réparer ces aléas. "Il faut faire des concessions!" comme diraient nos parents. La première définition qu'on a trouvée sur le net pour le mot "Concession" est :
"Renoncement, abandon de certaines choses ou certains droits dans un conflit." La relation à l’autre a besoin que chacun fasse un pas vers celui qu’il aime. Les concessions, faites des deux côtés et sans se trahir soi-même permettent de se sentir bien et en adéquation avec la personne avec qui on partage sa vie. Après , soyons honnêtes:"faut pas pousser le bouchon trop loin Maurice" . Encore faut-il être sûrs que la relation en vale vraiment la peine et qu'elle ne nous pousse pas à accepter l’inacceptable. Relations toxiques: OUT!
C’est ainsi que de concession en concession, il nous est, pour beaucoup, arrivé de nous retrouver en couple avec une personne avec qui on ne partage pas les mêmes valeurs, et qui n’a pas les mêmes projets que nous et vit à l’opposé de notre idéal, en nous demandant: " Mais merde où sont passés mes rêves?".
"L'homme pense que l'herbe est plus verte ailleurs. Il y a maintenant des difficultés dans la notion d'engagement avec cette peur de rester longtemps avec une femme et ne plus assouvir ses désirs. Les jeunes veulent profiter de la vie et sont constamment tentés. Le couple baisse les bras plus facilement pour surmonter les difficultés. L'être humain pense de plus en plus de manière égoïste et lâche prise rapidement quand il y a des conflits. Le divorce, la séparation ne fait plus peur et nous n avons plus honte de se séparer."

"Profiter de la vie" en recherchant indéfiniment LA personne qui correspondrait en tout point à ce qu'on recherche? Utopie? Et au final, tu sais ce que tu recherches toi?
Le couple en 2020 est soumis à un paradoxe assez spécial : il n'a jamais été aussi fragile et d'un autre côté, est de plus en plus idéalisé. 120 000 divorces par an, plein de potes qui se séparent, des marmots déchirés entre deux parents: tout ça, évidemment, malmène l’image du couple éternel. Pourtant on a tous envie d'y croire encore. Et la vie à deux reste , à en croire ce qu'on entend autour de nous, une des premières recherches de bonheur.
On se cherche donc et on se réinvente.
Sur le marché de l'amour: des modèles en veux-tu en voilà : mariés, pacsés, en union libre, homos ou hétéros, cohabitant ou non mais aussi de nouvelles valeurs qui s’immiscent dans la relation de couple : le respect de la liberté individuelle, l’égalité entre les sexes, une sexualité épanouie au max ( ça ne l'a pas forcément été de tout temps). Les plus vieux d'ailleurs ont du mal à saisir notre besoin de garder une part de notre jardin secret: "Je comprends pas vous avez plein d'activités que vous ne partagez pas à deux, c'est risqué! Vous sortez à droite à gauche sans votre partenaire, vous pouvez vous faire draguer n'importe quand et succomber plus facilement"
Nos attentes sexuelles ont aussi bien changé, on est certainement plus exigeants. On s’exprime beaucoup plus facilement sur le sujet, contrairement aux plus anciens pour qui, très souvent, le sexe était cantonné à la sphère du fantasme, des non-dits… On est un peu plus ouverts et on ose davantage dire ce qui nous plait ou ne nous plait pas. Mais c'est encore la même rengaine: on peut vite s'ennuyer en couple si on ne rajoute pas un peu de piment au lit (ou autre part, c'est toujours plus sympa de diversifier ses pratiques). On a vite l'impression de connaitre le corps de l'autre par cœur et au bout de quelques mois: paf!: "Il n'y a plus de "passion ", je me taille!"


"Quand la routine s'installe, réapprendre à séduire l'autre. Faire comme si, au détour d'un repas, c'était la première discussion, le premier regard. Se fixer un moment à deux chaque mois. Un voyage, même court, un truc insolite. Pour resserrer les liens."
"J aimerai plus voyager pour pouvoir partager en famille de nouvelles expériences et changer les rituels journaliers mis en place : boulot/sport/enfant et quelques sorties".
Génération: "j'ai peur de m'engager"?
Certes, l’amour des contes de fées en a pris pour son grade. Que ce soit nanas ou mecs, pas rares sont ceux qui ont les chocottes de "s'engager". Beaucoup flippent de souffrir, flippent de se tromper et de se terrer dans une relation qui ne leur conviendra probablement, pas au fur et à mesure du temps.
Tomber amoureux est un risque (celui d'être rejeté par le partenaire, de le lasser) et le fait de s'installer ensemble en est également un (que ça ne fonctionne pas avec le conjoint cohabitant)." Christophe Giraud, sociologue, L'amour réaliste
Certains ne se sentent pas à la hauteur de leur partenaire, manquent de confiance en eux et craignent pour leur liberté: l'adage "suis-moi je te fuis, fuis-moi je te suis" est symptomatique d'une génération qui s'épuise à prendre des décisions. Cette dimension de contrainte: "je vais devoir lui rendre des comptes", " je vais devoir me taper son programme tv", "je vais supporter ses humeurs", "putain, ses règles déjà, j'en peux plus!" Pourquoi se mettre autant de pression et ne pas vivre son histoire à 100%, vivre des moments tendres à 2 en sachant garder son indépendance? On ne nous a jamais mis le couteau sous la gorge pour échanger nos clés, si?
Mais... génération qui positive pour l'avenir!
- "Je pense que les couples de maintenant sont des personnes qui se sont choisies. Les hommes et les femmes sont égaux et chacun peut s'exprimer et exister en tant qu'individu propre au sein du couple. "
- "J espère un couple qui se respecte avec peu de séparations ou de divorces car s'il y a des enfants la souffrance se transposera malheureusement. J’espère un couple qui dure dans le temps."
- "En 2050, j'espère que le couple se suffira à l'essentiel, que les êtres humains auront une sexualité sans complexe et que ce ne sera plus quelque chose de tabou."

On finit cet article sur cette note positive, eh oui: 12 personnes sur 13 déclarent que c'est possible de rester avec la même personne toute sa vie!

"Sortez-couverts et aimez-vous" (enfin... après le Corona!)
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Kaïa et Etienne

"J'ai rentré mon ventre pour la photo" et "on a bu qu'une seule bière aux vieilles charrues"
Bel article qui donne envie de s'aimer 💕
👍👏 Top l’article !!